Pierre Bergounioux, La Toussaint, Paris, Gallimard, 1994, 144 p.
«On devrait s’arranger pour ne rien laisser traîner. On a un certain temps et un certain nombre de choses à faire. Quand le terme est échu, il faut laisser la place nette, comme neuve. Si on a été pris de court, ça ne coûte guère de laisser quelques instructions à ceux qui suivent. Ils sauront clairement ce qui demeure pendant, les arriérés qu’il reste à régler en plus de ce qu’ils auront à effectuer pour leur propre compte.
J’aurais aimé qu’il en aille ainsi, trouver la place libre, l’endroit tranquille ou, à défaut, qu’on me dise. Au lieu de quoi on nous a entraînés dans la brume, conduits devant des dalles de ciment moussu et fissuré. C’est là-dessous qu’ils étaient, nous a-t-on dit. C’était même écrit dessus. Ce qui fait qu’il ne nous est pas venu à l’esprit de chercher du côté où ils sont vraiment, où leur vie continue, obstinée, véhémente à proportion de ce qu’elle fut amère, amoindrie, écourtée.»
(Résumé tiré du site de l’éditeur)
VIART, Dominique, « Filiations littéraires », dans Jan BAETENS et Dominique VIART (dir.), Écritures contemporaines 2 : états du roman contemporain, Paris / Caen, Minard (La revue des lettres modernes), 1999, p. 115-139. +++ Chapitre de collectif
### Porte également sur L’Orphelin ###
DEMANZE, Laurent, « Les possédés et les dépossédés », Études françaises, vol. 45, n° 3 (2009), p. 11-23. +++ Article de revue
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Résumé
Sociologues et historiens de la famille décrivent la modernité comme la perte des communautés traditionnelles qui soudaient l’un à l’autre l’héritier et ses ancêtres. Pour s’inventer librement, l’individu moderne rompt les entraves du passé, mais cette libération est aussi vécue chez les écrivains contemporains avec culpabilité. Afin d’y remédier, ils font une place à la fois inquiétante et fondatrice aux spectres et aux revenants de la généalogie, qui étayent et disloquent la parole de l’héritier. C’est ainsi que Sylvie Germain et Jean Rouaud, Gérard Macé, Pierre Michon et Pierre Bergounioux sont des écrivains hantés. Ce sont autant d’héritiers dont les gestes reconduisent des vies antérieures, et dont les mots sont comme magnétisés par les parlures ou les inflexions des parents. Ces héritiers sont donc en quelque sorte à la fois dépossédés d’un passé familial qui n’est pour eux que ruines et deuil et possédés par ces êtres absents qui obsèdent leur conscience et parasitent leur parole. L’héritier est alors déchiré par la mélancolie, au point de se faire tombeau de ses ascendants. À travers la thématique spectrale, la littérature contemporaine analyse toute la situation ambivalente de l’individu contemporain, à la fois orphelin et parricide d’un passé familial, et les secousses inconscientes et linguistiques de cette perte.
ADLER, Aurélie, « Devenir du modèle autobiographique yourcenarien » , dans Bruno Blanckeman (dir.), Les Diagonales du temps. Marguerite Yourcenar à Cerisy, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007. +++ Chapitre de collectif
### Extrait d’un compte rendu
« Partie du Labyrinthe du monde de M.Yourcenar qui a opéré un renouvellement de l’écriture autobiographique par son esthétique du décentrement, Aurélie Adler montre dans « Devenir du modèle autobiographique yourcenarien » comment Pierre Michon dans Vies minuscules et Pierre Bergounioux dans La Toussaint ont d’abord perpétué puis reproblématisé le modèle yourcenarien en l’adaptant aux pratiques d’écriture contemporaines marquées par “l’ère du soupçon”. Mais le “paradoxe terminal” que relève Adler, pour parler comme Kundera, c’est que le décentrement du sujet yourcenarien ne récuse pas littéralement l’entreprise autobiographique mais l’autorise par le détour de l’autre (la famille, le milieu culturel et intellectuel). C’est ce qu’elle appelle “l’heuristique de soi sur l’axe vertical du temps des ascendants”. Sous forme de célébration de figures comme Descartes, Hegel, par le narrateur de Bergounioux, elle se présente à l’envers, chez Michon, par la profanation de Rimbaud. Au plan énonciatif, si Yourcenar exerce une certaine autorité sur le lecteur, Bergounioux et Michon avancent par hypothèse et déduction qui produisent une narration striée. » ###
LAURICHESSE, Jean-Yves, « Faire avec les morts: La Toussaint de Pierre Bergounioux », Littératures, n° 60 (2009), p. 29-42. +++ Article de revue
MARCHEIX, Daniel, « La mémoire et ses enjeux identitaires dans le roman francophone contemporain. Deux lectures de textes (P. Bergounioux et A. Hébert) », Thélème: Revista Complutense de Estudios Franceses, n° 19 (2004), p. 65-72. +++ Article de revue
La Toussaint (oeuvre) | |
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Titre | La Toussaint |
Auteur | Pierre Bergounioux |
Parution | 1994 |
Tri | Toussaint |
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