Discours critique sur les œuvres de littérature contemporaine
Nancy Huston, Dolce agonia, Paris, Actes Sud, 2001, 512 p.
« Voici une histoire dans laquelle notre guide n’est autre que Dieu lui-même, lequel s’est pris pour un romancier et s’est donné pour tâche de nous faire voir vers quel destin s’acheminent à leur insu les personnages.
Douze convives passent ensemble une soirée de Thanksgiving dans l’Amérique profonde, chez Sean Farrell. Parmi eux, on en reconnaît quelques-uns — comme Rachel ou Derek — que l’on avait rencontrés déjà dans La Virevolte. Ils sont tous campés avec l’autorité que leur donne une romancière rompue dans l’art de révéler le vertige des pensées et la valse des sentiments, une observatrice impitoyable des attitudes, des gestes et du comportement. Les douze parlent donc de la naissance et de la mort, ils discutent de la vie et de l’amour, ils déballent leurs espérances et leurs désillusions, faisant, au passage, voir le métissage profond de leur société. Mais nous, qui avons été avertis par Dieu-le-romancier du sort qui les attend, nous assistons à leurs conversations et à leurs manèges avec, dans notre conscience, le poids d’une vérité que nous avons reçue mais que nous ne pouvons leur transmettre. D’où une admirable tension narrative qui est bien la plus haute ambition d’un romancier. Et peu à peu apparaît ainsi l’allégorie dans la fresque singulière que brosse Nancy Huston : à l’occasion de cette soirée de Thanksgiving, c’est, en effet, le sens même de la fiction qui nous est proposé, avec les mythes fondateurs de la littérature romanesque.
Dolce agonia révèle un écrivain qui pourrait désormais s’inscrire dans le cercle des grands romanciers américains si, par la féconde fréquentation des deux langues qui sont siennes, l’anglais et le français, et des deux cultures où elles sont d’usage, Nancy Huston n’outrepassait toutes les frontières, linguistiques et autres, pour ne se réclamer désormais que d’une seule identité : celle d’une romancière que hante et qui habite le monde d’aujourd’hui dans sa vastitude et sa multiplicité. »
(Quatrième de couverture)
PROULX, Patrice J., « The Dance of Life and Death in Nancy Huston’s /Visages de l’aube and Dolce agonia », dans Eilene HOFT-MARCH et Judith Holland SARNECKI (dir.), Aimer et mourir: Love, Death, and Women’s Lives in Texts of French Expression, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars, 2009, p. 286-313. +++ Chapitre de collectif
Dolce Agonia (oeuvre) | |
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Titre | Dolce Agonia |
Auteur | Nancy Huston |
Parution | 2001 |
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